C’est suite à un échange ce jour avec une fidèle lectrice de mon blog (qui se reconnaîtra) que j’ai réalisé que mon premier voyage date de mai 1999. J’ai fêté donc cette année sans m’en rendre compte 20 ans de voyages.
J’ai eu envie de poser un premier état des lieux. J’ai la dent dure parfois envers mes congénères touristes et je réalise à quel point en 20 ans, tout a changé. Vu la tempête, j’avais du temps à y réfléchir, mes élucubrations façon ‘c’était mieux avant’ sont ci-dessous…
Le blog
Tous les voyages ne sont pas sur ce blog car j’ai commencé à le tenir réellement en 2004 avec un article par jour. Par ailleurs, suite à une année d’extrême fatigue professionnelle, un voyage à Prague et un en Thaïlande sont passés à la trappe car je n’avais aucune envie de mettre à jour le site, et le principe a toujours été que ce blog devait rester un plaisir et pas une contrainte. Parfois, j’ai un peu la flemme mais je me dis que c’est ma mémoire du voyage pour plus tard. J’aime relire mes vieux voyages, malgré les coquilles et les fautes que je ne vois pas toujours en tapant, les images me reviennent en mémoire, des moments oubliés ressurgissent du passé comme si j’y étais. Je me dis souvent qu’à ma retraite, je reprendrai tous les articles un par un pour les ré écrire mais plus j’avance en âge, plus le travail sera colossal car il y a plus de 631 articles publiés à ce jour.
En 20 ans, j’ai aussi évolué sur ma prise de notes, au départ sur carnets puis avec un mini ordinateur, ensuite sur tablette et enfin directement sur le téléphone. Mais le principe reste le même, écrire à chaud, le soir ou lendemain matin au plus tard, pour que les ressentis soient intacts, sinon les impressions s’edulcorent et loin de moi, l’envie d’écrire un guide touristique, d’autres s’en chargent, à commencer par le routard et le lonely planet. Pour ma part, je ne ne veux retranscrire que mon vécu, et laisser un écrit à mon image, sans fioriture, honnête avec la réalité et sans compromis. [J’y ai parfois un peu dérogé, surtout quand j’ai été en recherche d’emploi, le site figure dans la case ‘loisirs’ du CV, et je me disais qu’un trop grand franc-parler pouvait faire peur à un employeur en recherche de personnes rentrant dans le ‘moule’. J’ai changé d’avis depuis. ]
Ce blog est intégralement financé par mes soins, 4 euros par mois je crois maintenant, mon hébergeur augmente généreusement ses tarifs sans vergogne tous les ans et sans service supplémentaire, mais en changer serait trop lourd et compliqué alors on laisse couler. Combien de fois, surtout à une époque où ce genre de site était moins répandu, ai-je reçu des proposition de liens ou d’articles rémunérés (Pour les néophytes, je serais payée pour que mon site pour emmène vers des sites marchands) auxquels je prenais, au départ, le temps de répondre en expliquant qu’en galvaudant ainsi les liens, on ferait de l’internet un immense business où il n’y aurait plus que peu de place pour des sites d’expression personnelle quand on rechercherait des informations non commerciales. C’est ce qui est d’ailleurs en train de se passer. Pas de pub, pas de lien = liberté et indépendance éditoriale, je paye bien évidemment tous mes voyages donc je peux critiquer librement ! En dernier lieu sur le sujet blog, c’est aussi le lien avec ma mère qui s’inquiète depuis des années de me voir partir seule et qui sait ainsi au jour le jour ce qu’il m’arrive (ou pas) 🙂
Les voyages
Je n’ai pas toujours voyagé seule, j’ai traîné ma mère, un cousin, une copine, un copain, par ci par là, mon ex Francis qui avait peur en avion, qui détestait la chaleur et les insectes et qui a vécu ses pires moments dans un voyage en Inde au moment de prendre un train surpeuplé et de dormir sur un matelas moisi avec un sol toujours humide… Ma mère m’a dit un jour qu’elle ne se sentait plus de me suivre et qu’elle était trop vieille pour voyager, mon ex avait assez d’un voyage par an, qu’il fallait d’ailleurs aménager pour qu’il y trouve son compte aussi… Et un jour de juin 2004, je me suis cassée la cheville, tous mes congés d’été ont été transformés en arrêt maladie plâtrée, et j’ai du chercher ce que j’allais faire de mes vacances. Je ne pouvais pas beaucoup marcher mais le toubib m’avait dit que ça ferait une excellente ré-éducation, j’avais eu 7 semaines d’arret pour traîner sur Internet à la recherche d’une destination et je m’étais arrêtée sur les Maldives. J’étais allée chez Nouvelles Frontieres, j’avais fait établir un devis mais à cause du supplément single, je me suis vite rendu compte que ça me coûterait moins cher de prendre le vol et de réserver directement auprès de l’hôtel. Voilà comment j’ai construit mon premier voyage solo. Et après, ça m’ a tellement plu que j’ai enchaîné : Thaïlande, une révélation pour l’Asie du Sud Est, le Sri Lanka, le Sénégal etc… J’ai quand même vite réalisé que l’anglais etait une grosse nécessité en voyageant solo si je ne voulais pas limiter mes échanges au prix de la chambre et des repas, donc je me suis inscrite à des cours à l’institut Franco Américain pour me remettre le pied à l’étrier et j’ai aussi multiplié les destinations anglophones pour progresser. En 2009, j’ai changé d’entreprise et mes 5 semaines de congés payés se sont transformées en 10, d’autant plus de temps pour partir. Souvent, on me demande quel est mon pays préféré, j’ai aimé tous mes voyages, tous ont des plus et des moins, évidemment, des destinations comme la Malaisie, la Jordanie, l’Ouzbékistan, les Philippines aussi m’ont marquée par la gentillesse de leur accueil mais loin de moi l’idée de classer les pays…
D’autres pays se démarquent (démarquaient !!!) aussi par la qualité de leurs visiteurs, idem, pas question de hiérarchiser le voyageur, le voyageur en groupe est aussi respectable que le voyageur solo mais j’ai le souvenir de rencontres passionnantes d’un soir, autour d’un dîner ou d’un verre, avec le plaisir d’échanger, d’apprendre ou de comprendre. Selon la région visitée, on orientait aussi le destin… Forcement, au fin fond de l’Ouzbékistan, hors des sentiers battus, on tombait plus sur des gens vous ressemblant. Malheureusement, tout ça, c’est un peu du passé. Je parle d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître comme disait Charles et ça ne me rajeunit pas, mais à chaque voyage, je deviens de plus en plus nostalgique de ces rencontres touristiques et locales… Et oui, Internet est aussi passé par là, et si l’organisation des voyages s’en est trouvée grandement facilitée, malheureusement la communication avec les autres s’en ressent…Ah le bonheur de se retrouver perdu et de demander son chemin, terminé ! maintenant Google Maps est ton ami (et ton ennemi car ta liberté de bouger s’en ressent vu qu’à chaque géo-localisation, tu es suivi à la trace). Ah le bonheur des rencontres dans les hôtels, au restaurant, envolé ! Merci le Wi-Fi, la carte SIM locale, voire le roaming… Tout le monde est penché sur son téléphone et je suis le mouvement puisqu’aucune autre communication n’est possible…
En Géorgie cet été, nous étions 4 solos dans le même restaurant, chacun à une table. J’ai tenté une blague comme quoi c’était un resto pour célibataire, mais tout le monde a vite remis le nez sur l’écran. Désolant… Alors, ce qui faisait le charme du voyage en Asie ou au Moyen Orient, l’ouverture des gens et des touristes, je ne peux malheureusement constater que sa disparition. Je me rends compte que j’ai modifié aussi mes destinations, notamment vers l’Europe où rencontrer des gens a toujours été plus difficile pour moi et que je gardais pour des courts séjours, mais au final, en terme d’échanges, la différence n’est plus évidente entre un voyage aux Philippines ou en Italie et la solitude est potentiellement la même. Donc pourquoi aller aussi loin pour vivre la même chose ? Vive la standardisation et le tourisme de masse.
Bien que je sois ravie de trouver un vol à 50 euros pour aller en Israël au départ de Nantes, je suis de plus en plus inquiète de cette massification… Les prix sont tellement cassés que les avions ne sont jamais vide, évidement pour la même conso de carburant, on fait voyager plus de monde mais au final, on voyage maintenant pour un oui, pour un non.
On ne voyage plus, on consomme.
Un week end à Lisbonne revient moins cher qu’un week-end à Paris, tellement le transport aérien est peu cher comparé au train, aux péages ou à l’essence. Bilan, les avions déversent des centaines de touristes sur les mêmes destinations qui, développent des hébergements, des restaurants mais attention, aux goûts des touristes. On ne parle plus d’un bel hôtel mais d’un hôtel instagrammable.. Tout est stéréotypé. Pour le luxe, la piscine individuelle obligatoire, pour le cheap, une déco moderne type ikea est requise, ce qui fait que je me retrouve maintenant avec le même mobilier en Géorgie qu’au Portugal voire en Asie. Fin de l’authenticité. Et le pire exemple que j’ai vu récemment est Santorin, dénaturée au possible et pourtant si convoitée. Pour la nourriture, les touristes veulent être comme à la maison, donc pizza, burger, pancakes, Nutella doivent être au menu et on est prêt à payer bien plus cher pour en avoir.
Conclusion
Je m’interroge sérieusement sur comment je vais continuer à voyager dans un univers de voyageurs qui ne me correspond plus et auquel je ne veux pas être associée. J’ai passé 4 jours fin août à Ouessant et j’ai tout simplement adoré. Évidemment que l’envie d’évasion et de découverte est toujours là, mais comment la conjuguer avec un développement touristique actuel qui ne me plaît pas, on ne peut pas être juge et partie….
Une fois de plus tu écris ce que je pense. Moi aussi je ressens cette lassitude. Le voyage a tellement changé. Moi mon premier grand voyage date de 1972 ! et seule… depuis 2009, comme toi ! Faire des rencontres quand on est voyageuse solo est devenu de + en + difficile. Ils ont 25/30 ans, ils voyagent en bandes… ou en famille… ou à deux familles… Ils n’en ont rien à foutre de faire connaissance avec d’autres voyageuses, qui en plus sont solo. En général ce sont des mecs seuls que je rencontre en cours de voyage. Pour un dîner, une plage, ou une visite ensemble.
C’est dingue, ma fracture à ma cheville date aussi de 2004, comme toi ! Rapatriement sanitaire depuis Petra en début septembre 2004 !
Cela aussi m’est devenu contraignant de rédiger mon blog, avec souvent en plus des coupures ou des absences de wifi. Mais je me dis que si je ne le fais pas j’oublierai tout ce que j’ai vécu… C’est surtout pour ça que je continue à bloguer.
Et puis ça fait tellement du bien quand on voit qu’on est lu, non ?
Qu’on est seule, très loin, mais que d’autres nous suivent.
Oui pour les mecs seuls mais aux Philippines, ils sont rarement seuls 🙂